communiqués

L’affaire de « La Soif noire »

Suite de l’affaire de « La Soif noire » et du courrier à Éric Garandeau, président du CNC

Le 10 mai 2011, Les Monteurs associés ont adressé un courrier à M. Éric Garandeau, président du CNC, à propos du film de Jean-​Jacques Annaud, « La Soif noire ». Nous lui demandions de ne pas accorder l’agrément de production pour ce film.

Pour mémoire, le producteur de ce film, Tarak Ben Ammar, a engagé les techniciens français sous contrat tunisien, ce qui lui a permis de ne payer aucune cotisation sociale en France. Il demande cependant au CNC de lui accorder l’agrément, condition nécessaire pour pouvoir toucher le fonds de soutien. La commission d’agrément a par deux fois refusé son accord, mais ses avis ne sont que consul­ta­tifs. Il revient à la direction du CNC de formuler la décision définitive. Quant aux techniciens français, leur travail ne leur a généré aucun droit social : ni assurance chômage, ni retraite, ni Congés Spectacles.

Nous venons de recevoir le communiqué ci-​dessous du SNTR-​CGT, l’un des syndicats qui siègent à la commission d’agrément. Ce qui vient de se passer est extrêmement grave et ne peut rester sans réaction de notre part.

Communiqué :

« Pour quels motifs obscurs le CNC délivre-​t-​il l’agrément à Tarek Ben Ammar ?
À l’occasion de la commission d’agrément des films de long métrage qui a eu lieu ce jour 21 septembre, nous avons appris que M. Eric Garandeau, président du CNC, avait, durant le mois d’août, délivré l’agrément au film « La Soif noire » de Jean-​Jacques Annaud, produit par la Société Quinta Communications, présidée par M. Tarak Ben Ammar.

La société Quinta Communication avait imposé aux ouvriers et techniciens de travailler en qualité d’expatriés via une société tunisienne, ceux-​ci ne bénéficiant alors d’aucune couverture sociale et conven­tion­nelle. La commission d’agrément, dont l’avis est consultatif, avait unanimement émis un avis défavorable à la délivrance de l’agrément pour ce film, à deux reprises.

En délivrant l’agrément sans même en informer la commission, le président du CNC fait preuve d’une véritable défiance vis-​à-​vis des pro­fes­sion­nels du cinéma. En conséquence, les orga­ni­sa­tions pro­fes­sion­nelles de la CGT, artistes et techniciens, siégeant à la commission, ont décidé de quitter la séance qui a dû être ajournée.

Par ce type de décision, le Centre National de la Cinématographie s’émancipe de sa mission d’être la maison commune, en pri­vi­lé­giant des modes de production ciné­ma­to­gra­phique qui ne respectent pas les règles sociales tantôt pour des motifs de sous-​financement, tantôt pour des logiques de stricts profits.

Nous aurions besoin d’une direction du CNC plus active dans le long processus d’élaboration d’une Convention collective étendue de la production ciné­ma­to­gra­phique et plus présente dans la pro­blé­ma­tique sociale, en particulier en relation avec la numé­ri­sa­tion des salles.

Aujourd’hui, la Direction du Centre donne un signe de son peu de souci de garantir l’application d’un socle social et conven­tion­nel dans le cinéma. Les pro­fes­sion­nels que nous repré­sen­tons auront entendu le message, mais ne renonceront pas à exiger la mise en place de nouvelles règles sociales, sans lesquelles les beaux discours sur le cinéma comme fleuron national masquent mal un envers du décor social indigne de la qualité et de la diversité de notre ciné­ma­to­gra­phie.

Laurent Blois, Délégué général, pour le conseil syndical »