En 2021, nos deux associations ont rédigé, avec la participation de l’ADP, un Guide de bonnes pratiques pour l’emploi des assistantes et assistants monteurs, dans lequel nous détaillons le rôle et l’importance de l’assistant monteur, et expliquons les problèmes qu’entraîne leur sous-emploi, sur tous les types de projets.
Depuis plusieurs années, nous assistons au développement d’une pratique que nous récusons : l’attribution de tout ou partie des tâches qui devraient être dévolues aux assistants monteurs – engagés pour le film – à des assistants techniques employés en interne par les prestataires.
Récemment, nous avons eu connaissance du projet de certaines structures d’employer des assistants monteurs en CDI, assignés à des tâches répétitives, gérant plusieurs films en même temps, sans possibilité d’intégrer une équipe dédiée à un projet spécifique… Ce mode d’organisation étant imposé de fait aux chefs monteurs et aux réalisateurs.
Nous ne pouvons pas laisser ce genre de pratiques se banaliser.
Si ces employés peuvent sans doute effectuer un certain nombre de prestations techniques (synchro, sous-titrage, exports…), ils ne peuvent assurer un travail cohérent, techniquement et artistiquement, alors qu’ils interviennent sur plusieurs projets simultanément, parfois sans même avoir rencontré le chef monteur, ni le réalisateur.
Comment imaginer qu’une succession de personnes différentes tout au long d’un montage puisse assurer un travail de la même qualité qu’un assistant monteur dédié au projet, embauché sur sa durée et participant à son élaboration ?
Au-delà des tâches techniques, l’assistant monteur est la mémoire du projet et un collaborateur de travail. Il est un des premiers à poser un regard vigilant sur les rushes, à les annoter, à lire les rapports des scriptes et du laboratoire. Il décharge le chef monteur de nombreuses tâches chronophages (petits exports, maquettes VFX, titrages, recherches de musiques et de sons, etc.). Il suit les décisions complexes et changeantes pendant le montage permettant ainsi cette continuité entre le tournage, le montage et la direction de postproduction, donc in fine la production. À chaque étape, son rôle est primordial pour éviter les oublis et les ratés inévitables sans une vigilance continue, mais aussi pour nourrir la réflexion sur le montage grâce à son regard averti.
Nous l’avons mis en évidence dans le Guide des bonnes pratiques, le travail dispersé et parcellaire des « assistants maison » alourdit celui du chef monteur, entraînant une perte de temps et d’énergie au détriment du montage. La multiplication des intervenants conduit également à des erreurs techniques, et complique le travail et la supervision du projet par le directeur de postproduction.
Nous avons démontré à quel point ce mode d’organisation générait des surcoûts conséquents, contrairement aux économies apparentes que font miroiter les devis des prestataires.
Les plateformes internationales, qui ont pour objectif l’optimisation de leur organisation, l’ont bien compris, et imposent la présence d’assistants monteurs dédiés au projet, du tournage jusqu’aux finitions. Cette pratique devrait être la règle !
Pour finir, comment assurer la transmission du métier aux chefs monteurs de demain, si ceux-ci n’ont jamais fait l’expérience de l’assistanat, suivi des projets sur la durée, et eu la possibilité d’un véritable apprentissage auprès de leurs aînés ? Quel avenir professionnel réservons-nous à ces jeunes gens ?
Le travail de l’assistant monteur est un vrai poste, qui demande des compétences techniques, organisationnelles et artistiques. Redonner toute sa place à l’assistant monteur, c’est assurer la cohérence du travail de chacun pour que les films émergent dans les meilleures conditions.
ADPP | L’Association des directeurs de postproduction
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