14 associations professionnelles (dont LMA) publient cette semaine une lettre ouverte aux candidats aux élections européennes.
Chers candidats,
À l’occasion des élections européennes 2019, nous, professionnels du cinéma et de la télévision, aimerions vous interpeller sur ce qui nous apparaît comme un dévoiement de l’idée européenne.
En effet, certains États membres ont mis en place des politiques fiscales agressives afin d’attirer des investissements dans le cinéma et l’audiovisuel sur leur sol. Ces investissements, qui s’affichent comme un vecteur de développement culturel, ne sont en fait que de nouveau produits financiers dont la double conséquence est à la fois d’appauvrir les contribuables des pays concernés et de forcer le transfert des moyens techniques et humains d’un pays à un autre. C’est en fait déshabiller Jacques pour habiller Paul, un jeu à somme nul à l’échelle européenne.
Ces politiques faites sous la louable intention de développer la culture et l’industrie cinématographique locale, n’ont en réalité aucun impact positif sur la création. Ces exonérations fiscales ont transformé le cinéma en un produit financier comme un autre.
Certes ces financements irriguent notre cinéma. Le relèvement du plafond du crédit d’impôts français, qui fonctionne suivant d’autres critères, a en partie permis de réduire les délocalisations liés au tournage. Malheureusement, force est de constater que le plafonnement du crédit d’impôt à 80 % entraine naturellement la délocalisation des travaux après tournages.
Concrètement ce sont des entreprises qui ferment, des emplois qui disparaissent et des techniciens d’expérience qui sont contraints au chômage. Cette année, deux importants prestataires historiques, Éclair-Ymagis et Technicolor, sont profondément impactés et fragilisés, au risque de disparaître. Doit-on s’y résoudre sans réagir ? Nous ne le pensons pas.
Sur le long terme, ces politiques fiscales appauvrissent notre savoir-faire, fragilisent les entreprises techniques, fabriquent artificiellement du sous-emploi et hypothèquent nos capacités à répondre au développement d’activités de plus en plus importantes.
La mise en concurrence des pays européens entre eux ne fait que durcir les égoïsmes nationaux et ne fait que renforcer l’idée que l’Europe est un danger, au lieu d’être une chance.
Nous demandons, à l’occasion du renouvellement du Parlement européen que puisse être harmonisé l’ensemble des dispositifs fiscaux, quelle que soit leur nature, pour qu’ils cessent d’être mis en concurrence.
Plutôt que subir cette Europe dont les membres siphonnent la richesse de leurs voisins pour mieux s’enrichir, nous préférerions vivre une Europe qui ambitionne de développer une culture européenne solidaire, une culture qui s’enrichirait de nos diversités et de nos idées aux services de tous plutôt que d’avantages fiscaux aux services de quelques-uns.
Notre vision sera-t-elle votre ambition ?
Cette lettre est co-signée par les associations professionnelles suivantes :
AAPCA (Association des administrateurs de production cinéma & audiovisuel)
ACFDA (Association des chargés de figuration et de distribution artistique)
ADC (Association des chefs décorateurs de cinéma)
ADP (Association des directeurs de production)
ADPP (Association des directeurs de postproduction)
AFAR (Association française des assistants réalisateurs de fiction)
AFC (Association française des directeurs de la photographie cinéma)
AFCCA (Association française des costumiers du cinéma et de l’audiovisuel)
AFR (Association française des régisseurs du cinéma et de l’audiovisuel)
AFSI (Association française du son à l’image)
AOA (Association française des assistants opérateurs de prise de vues)
CST (Commission supérieure technique)
LMA (Les Monteurs associés)
LSA (Les Scriptes associés)
[Article mis à jour le 14/05 : l’ADPP est également signataire de ce texte.]
[Article mis à jour le 22/05 : l’AFCAA est signataire du texte.]