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Les cinémas rouvrent, les assistant·e·s monteur·euse·s lancent un cri d’alerte !

Lettre ouverte aux producteur·trice·s du cinéma et de l’audiovisuel

Paris, le 22/​06/​2020

Les Monteurs associés ne cessent d’alerter depuis la création de l’association en 2001 sur la lente dégradation des conditions de travail des assistants monteurs. Cette dégradation s’est accélérée ces dernières années comme en témoignent les résultats de l’enquête que nous avons menée mi-​2018 à la demande du CNC. Aujourd’hui, la situation est telle que les assistants lancent un cri d’alerte.

Les Monteurs associés


Les cinémas rouvrent, les assistant·e·s monteur·euse·s lancent un cri d’alerte !

Si l’état d’urgence sanitaire doit nous contraindre momen­ta­né­ment à moins travailler, accordons nous le pouvoir de réfléchir et le devoir d’agir.

Aujourd’hui, les assistants monteurs lancent un cri d’alerte pour protester contre les conditions de travail qui les oppriment depuis plusieurs années, pour alerter sur leur disparition du processus de création des films et pour réclamer la per­pé­tua­tion de leur métier.
 
Il faut savoir que le montage d’un film, c’est un travail d’équipe, une équipe composée d’un réalisateur, d’un chef monteur, mais aussi d’un assistant monteur.
 
L’assistant monteur est le responsable technique du projet de montage et un inter­lo­cu­teur artistique. Il fait le lien entre les différents acteurs de la production (membres du tournage, labo­ra­toires, com­po­si­teurs de musique, techniciens des effets visuels, monteurs son…) et collabore à la création du film avec le chef monteur et le réalisateur. De ces col­la­bo­ra­tions étroites et du processus de trans­mis­sion qui en découle, naîtra alors un chef monteur averti !

Aujourd’hui, toutes ces fonctions nous sont retirées les unes après les autres. Nous sommes réduits à une seule fonction technique. Et encore ! Cette fonction technique est régu­liè­re­ment prise en charge par des pres­ta­taires de services, qui bradent leurs prix et concur­rencent nos salaires, au point où des productions osent nous proposer des conditions salariales indécentes : être payé un jour sur deux, à la demi-​journée, ou bien comme un « second assistant »…

De fait, notre activité est de plus en plus morcelée, avec des horaires en décalé du temps de montage. À cette irré­gu­la­rité s’ajoute la flexibilité. Souvent, aucun planning ne nous est délivré. Nous devons être disponibles à la demande, parfois du jour pour le lendemain. Tout cela est rendu possible par l’absence de contrat préétabli et signé, nous privant de toute protection sociale pendant notre activité sur un film.
 
Aussi, entre deux périodes ou deux journées de travail, nous pointons à Pôle emploi. Heureusement que nous pouvons toucher nos indemnités chômage ! Sans le savoir, Pôle emploi « aide » les producteurs à gérer leurs plannings.

Tout cela existe et constitue une réalité que les instances concernées n’ignorent pas. Cette situation a été exposée longuement lors des séances de négo­cia­tions de la convention collective du cinéma, en présence des syndicats de producteurs et des repré­sen­tants du CNC.
 
Nous faisons partie de la « grande famille du cinéma », mais comme nous sommes en bas de la hiérarchie, les derniers de cordée, nous sommes en voie de disparition. Si la corde se casse, il n’y aura personne pour nous rattraper.

Aujourd’hui, les monteurs travaillent de moins en moins avec des assistants, au détriment de leurs propres conditions de travail. Cette situation, qui était une exception il y a quelques années, est en train de devenir l’usage, une évidence de moins en moins questionnée. Et nous savons combien cette situation est pré­ju­di­ciable à la fabrication des films.
 
Nous, les assistants, nous ne pouvons plus nous taire. Nous avons décidé de rompre le silence qui nous oppresse et nous maintient dans des conditions de vie socio-​professionnelle trop précaires et très désta­bi­li­santes.

Nous espérons, avec la publication de cette lettre ouverte, que les spectateurs et les amoureux du cinéma connaissent enfin l’envers du décor, car, au-​delà des écrans, des paillettes et des tapis rouges, il y a aussi des salariés qui sont maltraités et ignorés, dans le silence général !