vie professionnelle

Publication de l’enquête sur les conditions de travail des assistants monteurs

Au mois de juin 2018 Les Monteurs associés lançaient une enquête auprès des assistants monteurs sur leurs conditions de travail dans le secteur du cinéma et de l’audiovisuel (fiction & docu­men­taire). 94 personnes ont répondu à cette enquête ; les résultats portent sur 363 films produits entre 2014 et 2018.

Cette enquête a servi à enrichir l’état des lieux réalisé lors des États généraux de la post-​production organisés fin 2018 et son pro­lon­ge­ment, la publication du Livre blanc de la post-​production cinéma.

Du rapport complet (à télécharger sur cette page) nous avons extrait des points clés, à lire ci-​dessous (et également disponible au télé­char­ge­ment).

Points clés

Conditions de travail

  • Aujourd’hui, les assistants monteurs travaillent majo­ri­tai­re­ment (58 %) de manière discontinue sur chaque film.
  • Aucune réunion de post­pro­duc­tion n’est organisée sur 62 % des projets et 42 % des chefs monteurs ne sont plus consultés sur l’organisation de leur équipe.
  • 34 % des assistants travaillent sur un temps inférieur à la moitié du temps de montage.
  • Leurs inter­ven­tions et leur travail s’organisent « au coup par coup » pour un tiers d’entre eux.
  • Près de la moitié des assistants ne sont plus présents aux réunions de travail relatives à la fabrication du film (musiques, effets spéciaux, montage son…).
  • Sur les fictions cinéma en annexe 3 et les docu­men­taires, près de 50 % des assistants travaillent en décalé du planning ou des horaires du chef monteur.
  • Le travail à domicile se pratique de plus en plus en docu­men­taire et apparaît sur les fictions cinéma en annexe 3.

Contrat, droits, salaire

  • 66 % des assistants signent leur contrat après leur dernier jour de travail, ce qui est illégal.
  • 27 % des assistants indiquent avoir déjà été déclarés une demi-​journée, ce qui est illégal.
  • Seulement 10 % des assistants ont un salaire supérieur au minimum garanti par les conventions collectives, alors que 64 % ont plus de 5 ans d’expérience.
  • 78 % des assistants font des heures sup­plé­men­taires et l’employeur se doit de les organiser. Or, seulement 5 % des assistants voient ces heures payées confor­mé­ment aux conventions collectives.
  • Les indemnités repas sont obli­ga­toires dans l’audiovisuel. Elles sont accordées à 66 % des assistants sur les fictions audio­vi­suelles, mais seulement à 10 % sur les docu­men­taires. Non obligatoire en cinéma, 43 % des assistants ont touché des indemnités repas dans ce secteur.
  • Inscrite dans le droit du travail, la prise en charge de la moitié de l’abonnement de transport par l’employeur s’élève à 38 % sur les fictions audio­vi­suelles, mais n’excède pas 8 % sur les autres catégories de film.

Documentaire

Très présents dans la préparation du travail de montage des films docu­men­taires (cinéma et audiovisuel), les assistants délivrent des compétences techniques aiguës, dépassant parfois même leurs attri­bu­tions. Leur res­pon­sa­bi­lité est alors accrue, ce qui au minimum devrait valoir salaire.

En revanche, les assistants se révèlent trop absents des salles de montage et éloignés du processus de création proprement dit, alors que le montage d’un film docu­men­taire pose des questions pratiques et éthiques extrêmement importantes. De fait, comment transmettre ce savoir unique ?

Fiction

Les conditions de travail des assistants sur les fictions cinéma en annexe 3 sont aujourd’hui alarmantes. Les résultats montrent que la présence et l’activité des assistants pendant le montage sont inférieures de moitié à celles relevées en annexe 1. Pourtant, il s’agit, d’une part, du même travail et des mêmes enjeux techniques et artistiques, et d’autre part, les techniciens et chefs de postes acceptent déjà de voir leur salaire abattu pour rendre possible la production du film, dans des conditions res­pec­tables : alors, pourquoi réduire d’autant l’activité des assistants monteurs ?

20 % des assistants des films de fiction (cinéma et audiovisuel) n’opèrent plus la syn­chro­ni­sa­tion des rushes, alors qu’il s’agit d’une étape pré­pa­ra­toire importante dans l’élaboration et l’appropriation technique du projet, dont l’assistant est responsable. De même, il se trouve dépourvu d’une certaine connais­sance des rushes, limitant alors son dialogue avec le chef monteur dans leur réflexion sur le film.

Audiovisuel

Sur les fictions audio­vi­suelles, bien que la moitié des assistants travaille sur des périodes continues, la moitié intervient toujours sur un temps de montage inférieur à la moitié du temps de montage. L’organisation du travail et les dépas­se­ments de temps de montage semblent plus maitrisés, mais les heures sup­plé­men­taires demeurent nombreuses et non payées. Les assistants sont également trop absents des projections et des réunions de travail, moments privilégiés de maîtrise du projet et de trans­mis­sion du métier.

Quelle garantie pour la qualité des films à venir ?

La présence limitée de l’assistant engendre un affai­blis­se­ment du suivi technique et artistique et multiplie les risques d’erreurs techniques. Elle impacte la réflexion artistique du chef monteur et du réalisateur, et empêche l’élaboration sérieuse de tout processus de trans­mis­sion du chef à l’assistant. Ce dés­in­ves­tis­se­ment du lien col­la­bo­ra­tif est favorisé par l’éloignement des assistants de la salle de montage et du temps de la création (présence limitée et discontinue, travail en décalé et travail à domicile).

Il faut faire revenir les assistants dans les salles de montage.

L’absence de pla­ni­fi­ca­tion et de dialogue dans l’organisation du travail provoquent une mauvaise coor­di­na­tion des corps de métiers impliqués, des aberrations budgétaires et des dépenses d’énergie inutiles (prise en charge du travail de l’assistant par le chef monteur, accrois­se­ment des heures sup­plé­men­taires, dépassement des temps de montage…), aux dépens de concer­ta­tions artistiques et col­la­bo­ra­tives raisonnées.

Il faut plus dialoguer pour mieux organiser.

Avec le numérique, les assistants ont acquis de nouveaux savoir-​faire techniques et artistiques, garan­tis­sant une rapidité d’exécution, une souplesse d’organisation et une fluidité de com­mu­ni­ca­tion entre les parties artistiques. Aujourd’hui les assistants monteurs peuvent intervenir directement et réagir effi­ca­ce­ment sur des travaux de montage, de montage son et d’effets spéciaux.

Il faut investir dans le savoir-​faire des assistants pour faire des économies.